mardi 8 mai 2018

L'abbé Odilon Hudon


Homélie des funérailles de
l’abbé Odilon Hudon 


 par Yves Hébert, ptre

Ce 5 mai 2018

La maladie foudroyante d’Odilon ne nous a pas donné beaucoup de temps pour nous préparer à son décès.

Ce n’est jamais facile de voir partir des personnes que nous aimons. Mais c’est souvent plus difficile lorsque la mort survient subitement, sans avertissement. La mort apparaît alors comme quelque chose de violent, comme un voleur qui vient nous arracher brutalement quelqu’un de précieux.

Le décès d’Odilon nous rappelle que la vie est fragile. Quels que soient nos engagements, nos accomplissements, nos projets, nos inquiétudes, la quantité de relations, tout peut s’arrêter en quelques secondes. Un petit rien peut nous faire basculer du côté de la mort.

Cette situation peut nous donner l’impression que la vie humaine ne pèse pas lourd. Nous pouvons avoir l’impression d’être seulement un petit grain de poussière insignifiant qui est là aujourd’hui et qui demain peut disparaître.

Et pourtant, lorsqu’elle célèbre des funérailles, l’Église affirme le contraire (pas seulement les funérailles de prêtre).

L’Église met sa confiance en un Dieu qui aime infiniment chaque personne et pour qui notre vie a beaucoup de prix. Pour Dieu, il n’y a rien de plus grand qu’une vie d’homme ou de femme, telle qu’elle s’est déroulée.

Voilà bien justement l’une des grandes convictions qui animait Odilon : l’importance de la personne humaine, de toute personne humaine, quelle qu’elle soit, et avec une attention particulière aux personnes plus démunies et plus vulnérables. Une conviction qui s’est manifestée tout au long de sa vie dans ses divers engagements en pastorale sociale et auprès des personnes handicapées.

Dans son testament spirituel, Odilon raconte qu’il a appris cet amour inconditionnel pour les plus démunis de sa mère et de sa famille qui accordaient toujours à un neveu et une nièce handicapés une place entière dans la vie de famille. Odilon écrit : « C’est une valeur de mon milieu familial que j’ai mise dans mon sac à dos ». Une valeur qui a été nourrie également par 2 grands témoins qui l’ont beaucoup inspiré : Mère Thérésa et Jean Vanier.

Une autre grande conviction d’Odilon a été de montrer que la foi n’est pas quelque chose qui flotte dans les nuages ou qui reste enfermée dans les sacristies, mais qui s’engage concrètement dans la vie du monde, dans les enjeux importants de la société.


Ordonné prêtre pendant le Concile, Odilon a fait sien cette intuition de Vatican II que l’Église doit être en dialogue avec le monde et que l’être humain est la route privilégiée de l’Église.

Une intuition qui est en fidélité avec Dieu lui-même qui s’est incarné dans notre monde. Dieu nous aime tellement qu’en son Fils Jésus, il est venu partager notre condition humaine, dans une complète solidarité avec nous. Dieu est venu nous accompagner sur nos routes, y compris jusque dans la mort, afin de nous partager sa Vie, une vie qui ne meurt pas.

C’est ce qu’exprime à sa façon la page d’évangile que j’ai lue et qu’Odilon avait choisie pour ses funérailles.

Un choix qui, à première vue, peut nous étonner car il y est question d’une partie de pêche. Pourtant Odilon n’était pas reconnu pour ses talents à la pêche. On peut même s’avouer entre nous que, pour tout ce qui touche les activités manuelles, Odilon n’était pas des plus doués. J’en ai été témoin à quelques occasions, et ça donnait souvent lieu à des situations assez cocasses.

Odilon rapportait lui-même avec amusement que son père lui aurait dit, en voyant ses difficultés à accomplir les travaux de la ferme : « Odilon, tu vas être juste bon à faire un prêtre! »

On comprend bien que cette histoire de pêche au lac de Tibériade que nous raconte l’Évangile a autre chose à nous dire.

Les disciples dans la barque, au milieu de la nuit, qui ne prennent aucun poisson, ça peut ressembler à bien des situations d’obscurité, de déceptions et de pauvretés que nous avons à traverser dans nos vies, et qu’Odilon a lui aussi traversées : les choses ne se passent pas toujours comme on le voudrait, et la vie peut être parfois très déstabilisante.

Mais voilà que sur le rivage, un étranger apporte une nouvelle espérance, pleine de fécondité.

Un des disciples reconnaît l’étranger : « C’est le Seigneur! » Le Seigneur ressuscité! Celui qu’ils croyaient mort, voilà qu’il est vivant! Et il vient changer leur noirceur en lumière; il vient remplir leur cœur de Vie. 

C’est l’expérience intérieure que les disciples ont faite de Jésus ressuscité : une rencontre difficile à décrire mais qui les a transformés profondément.

Dans son testament spirituel, Odilon mentionnait que cette page d’évangile exprimait la source de sa sérénité et de son espérance, en rapportant une citation du cardinal Marty, qui était archevêque de Paris dans les années où Odilon étudiait à Paris en journalisme.

Voici la citation du cardinal Marty, où on peut y entendre la voix d’Odilon :
« Au terme de ma traversée, je sais que le Christ ressuscité m’attend sur le rivage. Comme pour les apôtres au bord du lac de Tibériade, je sais aussi qu’il m’a préparé le repas. Alors, comme le disciple aimé de Jésus, j’ai envie de crier ma reconnaissance : “C’est le Seigneur!” Et comme Pierre, j’aspire à être dépouillé de tout pour me plonger en Lui. Bientôt viendra l’heure de la dernière prière. Que ce soit celle du cardinal Newman : “Seigneur, il est temps que nous nous voyions!” »

Que cette paix et cette espérance qui habitaient le cœur d’Odilon nous aident à espérer le meilleur pour lui et nous aident à avancer sur notre route.

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